Pas très causant, le nouveau chez le barbier. Mais pour une fois,
celui-ci a plein de cheveux, coupés bien court, et pas de poils qui pointent du nez ou sur les oreilles. Et une bonne tête avec ça.
Même pas brusque, juste un peu bourru. En revanche il sait passer la tondeuse tout en douceur.
En remontant le long de la nuque sans appuyer dans le creux, par exemple. Ou en me tenant la tête de l’autre main en écartant bien les doigts :
avec le ronron de l’appareil et ses vibrations sur la peau, j’aurais presque envie de fermer les yeux.
Mais du coup je ne verrais pas le nouveau du barbier. Alors qu’avec l’excuse de me regarder dans le miroir,
je peux poser mon regard sur lui sans manières. Et que j’aime bien son port. Comment lui va cette chemise aussi. Surtout sa largeur de cou
dans le col ouvert juste au-dessus du bouton. Sans oublier la bosse sous la braguette parce que la coupe de son pantalon ne me déplaît
pas non plus. Ça fait plein. Plein et presque à portée de la main, vu la hauteur de son sexe. Si je pousse un peu mon bras comme ça,
dès qu’il passera la tondeuse sur ma droite il –eh bien rien. Apparemment il préfère me renverser la tête en arrière.
Sauf que ce n’est pas une raison pour abandonner. Au contraire. En tâtant à l’aveugle pendant qu’il se concentre tellement sur le sommet
de mon crâne, je devrais sentir… voilà : la limite de l’accoudoir. Et faire dépasser ma main.
Une chose est certaine, j’aime bien son odeur.
Ah… il se déplace sur le côté et… oui, il se rapproche. Glisse un peu sur la tranche du fauteuil. Et butte contre ma main. Je suis juste sur ta bitte.
Là, reste comme ça que je sente cette mollesse rebondie. Que… c’est ça, appuie-toi que je m’enfonce un peu et –ne baisse pas les yeux pour voir,
non… Il s’écarte. Evidemment.
Oh-là, c’était un peu plus brusque ce renversement de tête pour passer la tondeuse derrière l’oreille.
Et maintenant, je ne vois carrément plus rien avec sa main bas sur mon front. Agréable quand même. Il a la paume chaude, les doigts larges.
Je repose la mienne négligemment ?
Genre il est très près et je n’y vois rien et c’est vraiment un pur hasard et tout ça quoi… (en espérant ne pas trop pousser le bouchon).
Sans compter que rien ne dit que j’atterrirai où je souhaite… Justement : trop dur. Ça doit être… sa hanche ?
Oui, sa hanche, je sens la couture du pantalon.
Et lui ma main. Cette hésitation ne trompe pas. Je crois.
Je reste comme ça alors.
Mais lui aussi. Bon, ça ne veut pas dire grand-chose, ou pas encore.
Ceci dit, toujours là. Tous les deux. Et si…
Et si je faisais mine de prendre appui juste plus par ici pour me redresser un peu ? Là, doucement, mais… clairement.
Juste une légère pression sans appuyer, un peu plus près de sa braguette.
Il n’a pas bougé. Il me tourne la tête dans la direction opposée, mais reste là.
Ok.
Glissons imperceptiblement la main plus près encore.
(J’ai l’impression qu’il respire un poil plus profondément. Comme s’il contrôlait son souffle…) Attends, attends :
si je tends le cou un peu à gauche, histoire de me gratter, là… il devrait se rapprocher de moi et –comme ça : je la sens qui se pose, oui.
Qui pousse. Qui presse légèrement. Et il ne s’écarte pas. Je peux même pousser gentiment à mon tour et… ma parole je bande. Mais il ne reste pas
indifférent non plus. Tout en ne montrant rien. Rien du tout, sauf qu’on dirait presque qu’il se frotte très, très doucement, imperceptiblement.
Et je sens que ça prend du volume. Elle se gonfle lentement. Il s’écarte mais… voilà, revient se poser plus franchement. Et je m’enfonce maintenant
assez clairement.
Encore heureux qu’il tourne le dos à la vitrine et qu’il n’y ait personne à l’intérieur. Rien que la radio.
– On passe derrière pour que je vous lave les cheveux ?
– D’accord.
Sourire. Et coup d’œil à sa braguette : pas de doutes, il y a plus de matière qu’avant. D’ailleurs,
il met la main dans sa poche pour se rajuster l’engin l’air de rien.